Culte du dimanche 11 juillet 2021
Prédication par le pasteur David Veldhuizen
Textes bibliques : Amos 7,12-15 et Marc 6,7-13
Frères et sœurs,
Hier, c’était le premier samedi de la période des vacances d’été, et Bison Futé a compté jusqu’à 1100 kilomètres de bouchons cumulés. On imagine que beaucoup des automobilistes pris dans les embouteillages samedi ont passé quelques heures vendredi pour préparer leurs bagages avant ce départ, que certains attendaient sûrement depuis longtemps. Car avec l’impatience du départ, il y a aussi cet enjeu de partir avec ce qui nous sera nécessaire sur place. Nous n’avons en effet ni l’envie ni les moyens de nous équiper complètement une fois arrivés sur notre lieu de vacances.
Les disciples de Jésus, eux, n’ont pas été envoyés en vacances, loin de là. Ils vont avoir de quoi faire : prêcher l’arrivée du Royaume de Dieu, encourager à la conversion, chasser des démons, guérir des malades… On oublie souvent qu’il n’y avait à priori parmi les Douze aucun théologien, aucun responsable de synagogue, aucun prêtre exerçant à Jérusalem ou ailleurs. Les Douze ? Nous ignorons les activités de la plupart d’entre eux quand ils ont été appelés, mais nous savons qu’il y avait parmi eux des pécheurs, et au moins un collecteur d’impôt. C’est cette équipe qui va partir, en binôme, avec des paroles entendues de Jésus – mais il n’avait pas encore donné tout son enseignement, et celui-ci n’avait pas encore transcrit par écrit. Les paroles de Jésus, donc, et une autorité pour affronter les esprits impurs. Et aussi, un bâton et des sandales. Mais ni nourriture, ni tenue de rechange, ni argent. Pas de doute, la motivation des déplacements des Douze et leur « bagage » n’a rien à voir avec nos vacances !
Le prophète Amos, quant à lui, est pris à partie par un prêtre, Amassia. Amassia, c’est le prêtre de Béthel, le sanctuaire royal ; Amassia appartient donc à l’élite religieuse qui est associée à la royauté. A cette époque, c’est Jéroboam qui occupe le trône d’Israël. Sous son règne notamment, l’hypocrisie et les injustices sont considérables. Le peuple, conduit par ses élites, s’éloigne de la volonté de Dieu.
De son côté, Amos vient du royaume voisin, de Juda. Il explique lui-même être éleveur et cultivateur. Mais Dieu l’a appelé pour transmettre un message à son peuple. Investi de la fonction de prophète, Amos doit interpeller Israël dans l’espérance d’une repentance et d’un retour sincère à Dieu, y compris en matière de justice sociale.
On comprend donc très bien qu’Amassia soit exaspéré par Amos. Ce dernier est accusé de n’être qu’un prophète cupide, qui attend d’être payé pour annoncer quelque chose de plus agréable à l’oreille des uns et des autres. Amos répond qu’il n’a pas choisi d’être prophète, il n’essaie pas de gagner sa vie ainsi. S’il est près des puissants d’Israël, c’est que Dieu lui a justement demandé de s’adresser au peuple d’Israël pour le supplier de changer de comportement. Amos est un prophète malgré lui. Il n’a donc rien à voir avec ceux qui entourent le roi en espérant s’enrichir ou exercer une influence ou un pouvoir sur les plus faibles. Amos, ici, peut nous faire penser à l’attitude de Luther, le Réformateur, qui, face aux autorités catholiques de son temps, refuse de renoncer à sa compréhension de la Bible. Vous connaissez cette phrase que Luther a prononcé devant la diète de Worms, en 1521 : « Ma conscience est captive de la Parole de Dieu ». Amos, comme plus de 2 000 ans après le Réformateur, est habité par cette certitude : la mission qu’il a reçu, la parole qu’il doit porter de la part de Dieu est plus importante que le confort des puissants. Le message à partager et à diffuser est aussi plus important que son confort personnel.
Revenons au texte de l’envoi des disciples en mission, dans l’évangile de Marc. Comme Amos, qui avait laissé de côté son activité et donc ses moyens de subsistance, les Douze sont invités à la confiance. En fait, la mission est indissociable de ce pari de la confiance. Jésus résume la situation : à certains endroits, les binômes de disciples seront bien accueillis, ils seront nourris et logés, ils seront écoutés, et l’autorité qu’il leur a confié sera reconnue. Mais dans d’autres lieux, ils feront face au rejet. Jésus, comme toujours, ne demande pas à ses envoyés de s’imposer, malgré tout. Non, ils sont invités à ne pas insister, à repartir en « secouant la poussière de leurs pieds », manière de signifier qu’ils ne doivent pas prendre sur eux la négativité des autres. Ils doivent rester légers, confiants, mobiles. Ils le doivent, car la mission ne connaît pas de limites ! Ne pas être accueillis quelque part ne signifie pas l’arrêt de la mission.
Ces deux textes, qui étaient proposés pour aujourd’hui, suggèrent que celles et ceux qui reçoivent la Parole de Dieu peuvent l’accepter, comme Amos, comme les Douze, comme tant d’autres à travers les siècles, et qu’accepter vraiment cette Parole transforme leurs priorités : leur conscience, inspirée par l’Esprit, sait que ce trésor doit être partagé, et que cela passe par eux, où qu’ils soient, et par eux, où qu’ils aillent. Mais ces textes ne sont pas naïfs. Certains refuseront la Parole de Dieu : ceux qui, comme Amassia ou Jéroboam, pensent qu’ils risquent de perdre leur pouvoir ; ceux qui, visités par des disciples, n’en veulent pas, quelles que soient leurs raisons. Mais ces rejets, encore une fois, ne sont pas la fin de la mission.
Tout à l’heure, nous allons réfléchir sur la mission de l’Église, en pensant à notre Union nationale mais aussi à notre communauté locale d’Annonay. Et nous nous demanderons s’il est possible de témoigner de notre foi dans notre monde. Cette question n’existe ni chez Amos, ni chez Marc. Elle n’existe pas dans la Bible, ni dans l’histoire de la chrétienté. Si nous sommes réunis aujourd’hui dans ce temple, si nous confessons aujourd’hui sereinement le Christ, c’est qu’hier, d’autres ont pris des risques pour témoigner de leur foi, dans un contexte parfois hostile.
Ce qui est déterminant, c’est l’appel reçu, la conscience de l’importance de cet appel, l’autorité conférée par Dieu et le choix de la confiance. Quel appel et quels talents avons-nous reçus ? Quelle importance accordons-nous à la Bonne Nouvelle pour nous et par extension pour nos contemporains ? Jusqu’à où faisons-nous confiance à Dieu pour prendre le risque de nous mettre en chemin, d’aller à la rencontre de nos prochains, et de leur parler de notre Sauveur ?
Il est vrai que nous ne sommes pas tous appelés à être prophètes, ou à être apôtres. Les formes de témoignages ainsi que les formes de ministères sont multiples. En fait, la question n’est pas tant : « Sommes-nous appelés à témoigner de notre foi ? » que « Où et auprès de qui sommes-nous appelés à témoigner ? » Est-ce près de chez nous, auprès de nos proches ? Ou ailleurs, auprès d’inconnus ? L’évangile nous suggère que si notre témoignage n’a pas reçu un accueil favorable quelque part, s’il gêne, s’il n’est pas écouté, c’est que nous pouvons recommencer ailleurs, auprès d’autres personnes.
Alors, comme les disciples, allons-y à plusieurs, mais allons-y ! Jésus, puis un cantique, le rappellent : la moisson du monde est grande ! Le Christ est avec nous. Que l’Esprit Saint renouvelle notre témoignage ! Amen.