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La joie, étape et destination pour le peuple de Dieu
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Culte du dimanche 13 décembre 2020
Prédication par le pasteur David Veldhuizen
Textes bibliques : Ésaïe 61,1-11 et 1 Thessaloniciens 5,16-24
Frères et sœurs,
Il y a des longueurs qu’il serait dommage d’abréger. Le messager du livre d’Ésaïe prend ainsi le temps de développer abondamment les promesses de bénédiction que Dieu adresse à son peuple. Le contenu de ces promesses est particulièrement agréable pour un groupe d’hommes et de femmes qui a traversé une série d’épreuves. Par son lyrisme et ses comparaisons, ce discours construit un univers merveilleux et festif.
Des paroles sont spécifiquement adressées aux pauvres, à ceux qui ont le cœur brisé et aux endeuillés, aux déportés et exilés, aux prisonniers, à ceux qui ont perdu leurs champs, leurs maisons, leurs villes, leurs lieux de culte, leur honneur. Qui n’est pas concerné, à un titre ou à un autre ?
Et qu’est-il promis ? Une bonne nouvelle, la guérison, la liberté, la grâce, la victoire sur les ennemis, la reconstruction de ce qui a été abattu, le service par des étrangers c’est-à-dire une certaine indépendance et même une domination sur d’autres nations, une prospérité dans les récoltes, une certaine gloire, une joie sans fin, une alliance éternelle avec Dieu, une notoriété universelle en faveur des générations suivantes… A deux reprises, le peuple est comparé à de la végétation, des cultures luxuriantes ; à deux reprises également, il est comparé à un membre d’un couple qui célèbre son mariage.
Comme je le disais, il y a beaucoup pour satisfaire nos désirs humains, y compris certains qui peuvent redevenir des maîtres pour nous : orgueil, cupidité, soif de puissance ou de pouvoir, d’influence ou de célébrité… Oui, la liste des promesses est longue. Or, si toutes se veulent des bénédictions, il s’agit de bien comprendre que certaines d’entre elles symbolisent davantage le retournement ou la fin d’une situation qu’un objectif : ainsi, être servi par des étrangers signifie surtout que le peuple sortira de son esclavage envers les puissances qui l’ont exilé ; de même, la notoriété et l’honneur viennent répondre à la faiblesse géopolitique des tribus d’Israël et de Juda.
Chez Ésaïe, de longs développements décrivent la joie à venir, joie qui dépendra de l’arrivée d’un Sauveur envoyé par Dieu. Quelques siècles plus tard, l’apôtre Paul, s’adressant aux croyants de Thessalonique, utilise des formules brèves, à l’impératif, pour que la joie soit présente dans les communautés chrétiennes, dans l’attente de la venue de Jésus-Christ. Comme le pasteur Eric Denimal nous l’avait rappelé en novembre, les Thessaloniciens espéraient le retour du Christ de leur vivant, à court terme. Ce retour n’a pas encore eu lieu, mais la joie n’est déjà plus une promesse. La joie n’est déjà plus une promesse, c’est une possibilité, un choix, pour aujourd’hui. Comme l’amour, la joie ne se commande pas. Mais l’apôtre multiplie les conseils : prier sans restriction aucune, dire sa reconnaissance à Dieu aussi souvent que possible, laisser l’Esprit agir en nous, se placer à l’écoute attentive des prophètes, discerner et s’attacher au bien en rejetant le mal… La joie ne se commande pas, mais elle se reçoit, pour peu en effet que nous ouvrions nos mains, nos esprits, nos cœurs. La joie se reçoit, et celui qui la donne, écrit Paul, « est fidèle ».
Cette année encore, en ce temps de l’Avent inscrit dans une année éprouvante, la joie peut paraître déplacée. Les mesures de protection sanitaire n’ont pas empêché que de nombreuses familles soient endeuillées. Nos activités sont limitées, nos projets reportés ou annulés. Nous entendons des messages anxiogènes, des rumeurs angoissantes. Beaucoup souffrent mentalement. Alors oui, aurons-nous vraiment l’esprit à la fête dans les conditions annoncées pour le déroulement de Noël et le réveillon du Nouvel An ? La sortie de crise n’est pas pour le futur proche, alors pouvons-nous nous réjouir ?
En y réfléchissant bien, la prophétie d’Ésaïe apporte de la joie, non pas parce qu’elle s’accomplit au moment où elle est énoncée, mais parce qu’elle promet que le désespoir et le deuil n’auront pas le dernier mot. Bien sûr, pour l’instant, il y a des ruines, et reconstruire quelque chose – quelque chose de différent du passé – prendra du temps. Mais il y a de la joie à venir, et cette attente suscite déjà, dans une moindre mesure, une joie pour le présent.
Notre présent, c’est ce temps de l’Avent, qui doit se conclure sur Noël. Mais là aussi, Noël, qui nous rappelle la naissance de Jésus, la naissance du Sauveur attendu, Noël n’est qu’une étape, qu’une joie préalable à celle du ministère de Jésus et surtout de sa résurrection. Oui, entre sa venue au monde et son ministère d’enseignement et de libération, il s’écoule environ trente années ! A hauteur de vie humaine, c’est-à-dire selon notre perception, et cela est valable que nous ayons trente, soixante ou quatre-vingt-dix ans, trente ans, c’est considérable ! Pourtant, pour Marie et Joseph, ses parents, pour leurs proches, pour les bergers, pour les sages venus d’Orient, ce qui se joue au moment de la naissance de Jésus provoque un émerveillement juste, légitime.
Un peu plus tard, à l’époque de l’apôtre Paul, le Messie est déjà venu, une première fois, vivre, mourir et dépasser la mort. Cette mort dépassée est déjà source d’une joie profonde, durable. Mais là encore, elle n’est peut-être qu’une étape. Prière et reconnaissance nous aident à cultiver cette joie venue de Dieu, mais elle ne constitue qu’un avant-goût d’une joie encore différente, encore plus forte, quand le Christ reviendra, quand son Royaume s’établira.
Oui, la joie appartient à tout ce qui, dans la foi chrétienne, est situé dans cet espace mystérieux et troublant du « déjà » et du « pas encore ». Nous avons hâte de reconstruire, même si l’avenir n’est pas une répétition du passé. Nous avons surtout hâte d’arriver à destination. Sur le chemin, à chaque instant, nous recevons suffisamment pour continuer à avancer. Que l’Esprit de Dieu ouvre nos cœurs à cette joie, qu’il soutienne notre espérance dans l’attente ! Amen.