Une diatribe assez virulente est née entre Jésus et les dirigeants religieux, les pharisiens et les docteurs de la loi au sujet de l’autorité de Jésus.
• Par quelle autorité fais-tu ces choses ? Ces « choses », ce sont d’une part les enseignements qu’il donne dans le Temple et d’autre part le fait d’en avoir chassé les vendeurs.
Nous sommes dans la Semaine Sainte au lendemain de la fête des Rameaux.
On peut comprendre leur réaction : voilà un homme qui entre dans le Temple, il avait déjà troublé l’ordre public par une entrée ovationnée dans Jérusalem sur un âne, cet individu, se permet d’enseigner alors qu’il n’a pas été à l’école rabbinique et voilà qu’il fait un fouet et chasse violemment les vendeurs qui font cela depuis des générations !
Jésus ne répond pas à la question directement. Il renvoie les pharisiens et les docteurs de la loi, les maîtres spirituels d’Israël à leur inconséquence concernant la venue de Jean Baptiste : Jean est-il venu du ciel ou des hommes ? Et comme ils disent ne pas savoir, Jésus leur refuse une réponse à la question concernant son autorité. Mais il enchaîne avec cette petite parabole des deux fils :
• Le fils « NON » qui représente les « perdus », les petits, les rejetés, les gens de mauvaise vie, les prostituées, les lépreux et les collecteurs d’impôts, les collabos, quoi. On peut ajouter les Samaritains.
• Le fils « OUI, PAPA » qui représente les « bien-pensants », les « croquants et les croquantes, les gens bien intentionnés », chantait Georges Brassens, donc les pharisiens, les saducéens les docteurs de la Loi.
• Le père demande à ses fils d’aller travailler dans sa vigne, dans la Bible, la vigne, c’est le peuple de Dieu, que ce soit dans le 1er Testament (le peuple Hébreux) ou dans le deuxième (les juifs et l’Eglise)
• Le fils « NON » se repent, se reprend, c’est-à-dire qu’il repense à la demande de son père et se dit que si son père le lui demande, c’est qu’il en a besoin. Il est jeune et cela lui semble tout à coup normal. Jésus fait bien sûr allusion, là, au baptême de repentance que propose Jean Baptiste où le candidat déclarait son péché et vouloir s’en détourner.
• Le fils « OUI, PAPA » a dit ce oui pour plaire à son père, peut-être. Il se dit ensuite qu’il a la flemme, qu’un ouvrier de moins, ça ne se remarquera pas et qu’il n’a pas envie de se coltiner une journée de boulot en plein soleil à la vigne.
• Le fils « NON » fait « OUI » ! Allusions de Jésus à croire que Jean Baptiste a bien été appelé par Dieu et que Jésus est bien le Messie, le Christ .
• Le fils « OUI, PAPA » fait « NON » Démission des responsables
Jésus pose alors la question à laquelle je pense que les pharisiens ont eu du mal à prononcer la réponse : « Quel est celui qui fait la volonté du père ? »
Arrêtons-nous sur cette question : faire la volonté du Père, dans la Bible c’est croire ; faire, c’est croire, et non pas s’activer. Croire que Jésus est le Fils que le Père a donné au monde pour le pardon des péchés.
Le fils « OUI, PAPA » est en fait un « OUI, MAIS » le « mais » tue le « oui », toujours. Jésus a dit : « Que ton OUI soit OUI, ton NON, NON, ce qu’on ajoute vient du Malin »
Il est facile de parler d’amour et d’agir en contradiction avec l’amour tout en prétextant s’y confirmer.
Exemple : le France a signé la convention des « Droits de l’homme » qu’elle a composée, mais il ne faut pas trop d’étrangers dans nos quartiers !
La lettre de Jacques dont nous avons lu un passage en donne aussi un bon exemple : étiqueter les personnes d’après leur richesse apparente et mépriser le petit. Mais aller travailler à la vigne du Père, c’est précisément prendre soin des plus démunis sur tous les plans !
Nous faisons souvent et inconsciemment le « OUI, MAIS » :
-Si j’aime Dieu ? Bien sûr !
-Oh, regarde qui arrive ?
-Je ne peux pas la sentir !
-Je suis chrétien, j’aime mon Eglise mais pas quand il y a un partage œcuménique, tu sais, ILS ne pensent pas comme nous et puis, on n’a pas besoin de se mêler.
-Oh, que j’aime quand les jeunes animent le culte et participent à la liturgie, mais je ne supporte pas leur musique trop forte !
Aimer, ce n’est pas plier l’autre à soi !
Mais, revenons à la parabole :
Le fils « NON » est catégorique, pas de « papa » ou de « Seigneur », selon les traductions, pour arrondir les angles : un NON sec. Il est entier, Il ne cherche pas à paraître, mais il réfléchit, il est honnête. Il corrige son attitude.
En contant cette histoire, cette situation, Jésus invite à « se remettre en question » c’est-à-dire à reconsidérer notre attitude avec le regard de Dieu, donc du père de la parabole. Considérer que le Père a raison : il a réellement besoin du travail de son fils. En y allant, le fils entre dans le désir du père.
Se remettre en question est le propre du chrétien. Remarquez que pour les juifs du 1er Testament, c’était déjà une priorité :
– Le Ps. 51 termine par : « Regarde si je suis sur une mauvaise voie et conduis-moi sur le chemin de l’éternité » priait David.
– Nous avons vu dans les écrits du prophète Ezéchiel, l’idée de la justice de Dieu qui sauve le méchant qui renonce à pratiquer le mal et au plaisir qui l’accompagne.
– Jérémie est envoyé par Dieu chez le potier or celui-ci rate son œuvre, doit enlever sa terre du tour et recommencer ! Savoir reconnaître son erreur et repartir dans une meilleure direction.
J’ai deux cobayes, cochons d’Inde (ricous) chez moi et l’un est très nettement dominant et l’autre bien sûr dominé. Le dominant sait très bien d’un petit geste de la tête déloger son compagnon si la place l’intéresse et même pire, il force son compagnon à lui laisser le biberon d’eau, par exemple, mais une fois qu’il l’a, il ne boit pas, il n’a pas soif ! Soyons attentifs à ne pas être des dominants. On y glisse très vite : « Tu es nouvelle ? Je connais toutes les habitudes ici, tu vas voir, tu les connaîtras vite ! » sous-entendu : tu ne vas pas les changer !!
Nelson Mandela disait : « Je n’ai pas peur de mes ombres, j’ai peur de mes lumières » Quand je brille, je crains de ne pas entrer dans la volonté de mon Père.
Jésus est clair : faire la volonté de Dieu, nous couler dans son désir, exige une conversion intérieure, un passage du NON au OUI, ou du OUI, MAIS au OUI. Reconnaître sa propre résistance à l’amour
Les préjugés en sont et, parfois, Dieu, avec humour, nous enseigne par une personne envers qui nous avons des préjugés !
Enfin, je voudrais, avec vous, demander à Dieu de changer en moi ce qui n’est pas à son honneur, là où je réagis en auto-défense et pas en ouverture et accueil.
Seigneur, purifie nos intentions, mets à la lumière nos préjugés afin que nous les abandonnions, fais-nous prendre conscience de nos paroles qui contiennent une exclusion. Seigneur, tu connais nos résistances à l’amour, brise-les afin que nous aimions à la mesure de l’amour du Christ.
Amen.
Eveline Charier