Méditation du 23 juillet : la tempête apaisée

Pasteur Jaques Peterschmitt. Texte Marc 4,33-41. culte commun Eglise Evangélique Libre

Dans ce récit de la tempête apaisée, il y a une chose qui m’a étonnée.

Bien sûr, il est étonnant que Jésus puisse calmer le vent et la mer d’une simple parole. Mais ce n’est pas cela qui m’a étonné. Ce qui m’a étonné, c’est ce que dit Jésus à la mer : Tais-toi ! Sois muselé (c’est une traduction littérale) !

Si Jésus ordonne à la mer de se taire et d’être muselé, c’est que la mer parle, comme un humain.

Jésus aurait pu dire à la mer, « calme-toi », « arrête de t’agiter ».

Non, Jésus demande à la mer de s’arrêter de parler. Pour Jésus la mer parle.

La seule autre fois dans l’évangile de Marc où ce verbe museler est utilisé, c’est quand Jésus fait taire un démon qui parle dans la synagogue à tort et à travers. C’est au chapitre 1.

La mer, elle aussi, parle à tort et à travers, et Jésus la fait taire comme il a fait taire le démon de la synagogue.

Qu’est-ce donc que ce vent et cette mer qui parlent à tort et à travers et qui angoissent les disciples ?

Avant de répondre à cette question, demandons-nous d’abord ce qu’un humain ressent quand survient dans sa vie un événement qui le plonge dans l’inconnu.

Quand je parle d’un événement qui plonge l’humain dans l’inconnu, je veux parler de tous ces événements qui surviennent dans nos vies et qu’on aurait bien évités :

On pense bien sûr à la maladie, aux événements douloureux qu’on traverse, aux accidents, au deuil, au divorce, on pense au chômage, mais aussi à la guerre, à la montée de l’extrémisme, et vous pourrez compléter la liste…

Ces événements nous plongent dans l’inconnu car, quand ils nous arrivent, on sait que notre vie ne sera plus la même ; notre vie va changer dans un sens auquel on ne s’attendait pas.

Sans conteste, face à tous ces événements qui nous plongent dans l’inconnue, on a peur.

On a peur car on est plongé dans l’incertitude. On ne maîtrise plus rien.

Pour les disciples, l’événement qui les plonge dans l’inconnu est cet ordre que Jésus leur donne d’aller vers l’autre rive en traversant la mer. Et, cet ordre de Jésus met les disciples dans l’incertitude, donc la peur.

 

Comment réagit-on face à cette peur que provoquent ces événements qui nous plonge dans l’inconnu ?

C’est simple, on va vouloir se rassurer.

Et pour se rassurer, on va tenter d’analyser, de comprendre ce qui nous arrive. On va donc chercher des paroles.

Ces paroles seront d’abord des paroles qu’on va se dire à soi-même pour chercher à comprendre, pour chercher à évaluer sa responsabilité dans cet événement, pour définir éventuellement des choses importantes à faire ou à ne pas faire.

Parfois, quand cet événement nous plonge dans un inconnu très difficile, ces paroles qu’on se dit à soi-même tourneront en boucle dans nos têtes.

On risque fort, alors, de faire de l’insomnie. C’est ce que font les disciples dans le bâteau : une insomnie ! Alors que Jésus dort sur son coussin car c’est la nuit, les disciples sont éveillés. Les disciples, ce soir-là, ne dorment pas tellement ils ont de paroles qui tournent dans leur tête.

 

Mais les paroles qu’on cherche pour se rassurer ne viennent pas que de nous. A nos paroles intérieures, viennent s’ajouter les paroles des autres, celles de notre entourage mais aussi celles qu’on va chercher vers ceux qui pourraient nous sortir de cette peur que provoque cet événement sur nous. Généralement, on va chercher ses paroles chez ceux qui savent c’est-à-dire chez les scientifiques, les médecins, les gens qui ont de l’expérience.

 

Et là, le vent qui commençait à souffler à cause de ce que j’ai pu me dire à moi-même se renforce et la mer s’agite encore plus au point où l’eau commence à entrer dans la barque.

Comme les disciples, on se sent alors périr car dans toutes les paroles que j’ai entendues, rien n’est cohérent, tout parle à tort et à travers. L’un dit ça, l’autre dit autre chose, moi, je dis encore autre chose.

 

En fait, on se rend compte, qu’au lieu de rassurer, toutes les paroles que j’ai accumulées, de moi, des autres, loin de calmer ma peur face à l’inconnu, ces paroles l’augmentent. Alors qu’on cherchait à se rassurer par des paroles, les paroles qu’on a trouvé nous angoissent d’avantage.

 

Oui, c’est vrai, on peut se méfier de ces événements qui génèrent un flot incessant de paroles en nous, c’est un signe que ces événements nous font peur. On pense, là, au réchauffement climatique, aux élections législatives aussi (pour ne citer qu’eux !).

Que de paroles dites, que de prises de positions autour de ses 2 événements. Cela montre à quel point ils nous angoissent profondément. Pour ces 2 événements, la mer est vraiment déchainée pour nous.

 

Qu’est-ce donc que ce vent qui souffle et cette mer agitée qui suscite la peur des disciples ?

On peut maintenant répondre. Ce sont ces paroles qui entourent les événements de nos vies qui nous plongent dans l’inconnu. Loin de nous rassurer, ses paroles nous submergent car elles finissent par générer de la cacophonie.

Et, cette cacophonie ne génère qu’une seule chose : croire qu’on va périr. C’est ce que les disciples disent à jésus : « Maître, ne t’inquiètes-tu pas de ce que nous périssons ? »

Il s’agit donc de se sortir de cette angoisse que génère cette cacophonie.

 

Que font les disciples pour s’en sortir ?

Il réveille le Seigneur. Et aussitôt le Seigneur fait taire toutes les paroles, toute cette cacophonie que cet événement a produite chez les disciples. Cela va leur permette d’aller sur l’autre rive.

Je disais aux obsèques que j’ai accompagnées vendredi que la vie était un voyage, un voyage vers Dieu. Je disais aussi que la particularité de ce voyage était que c’était un voyage vers l’inconnu. Si Jésus envoie ses disciples sur l’autre rive, ce n’est pas pour le plaisir, c’est pour qu’ils commencent ce voyage vers Dieu, ce voyage vers l’inconnu.Le problème est que ce voyage vers l’inconnu suscite de l’angoisse.

Dans notre récit, les disciples se sont laisser prendre par la cacophonie des paroles dites à eux-mêmes et dites entre-eux. Face à l’inconnu, nous faisons cela pareillement.

On se laisse submerger par beaucoup trop de paroles contradictoires qui nous mettent dans l’angoisse.

Le problème est que le voyage vers Dieu n’est pas un voyage qui fait place à l’angoisse et à la peur.

Ce serait un comble !

Le voyage vers Dieu est un voyage qui doit se faire dans le calme grâce à la foi. C’est ce que Jésus dit aux disciples : « Pourquoi avez-vous ainsi peur ? Comment n’avez-vous point de foi ? »

Voilà donc ce qu’il nous manque le plus quand les évènements qui nous mettent dans l’inconnu génèrent des paroles et de l’angoisse. Il nous manque la foi.

C’est ce qui manquait aux disciples dans la barque. C’est ce que Jésus avait dans la barque.

C’est sur le coussin que Jésus dormait, sur le coussin de la foi. Il ne faudrait pas croire que Jésus dormait dans la barque parce qu’il savait ce qui allait arriver. Jésus dormait dans la barque car il avait confiance en son Père.

Alors quand nous sommes pris par la peur de ce qui nous arrive personnellement mais aussi collectivement parce que c’est l’inconnu, nous devons nous poser des questions car nous sommes en train de réagir comme les disciples dans la barque, comme le ferait tout le monde.

Nous sommes en train de nous laisser submerger par la cacophonie ambiante.

Réagissons donc !

Réagissons, pas en ajoutant des paroles à la cacophonie, mais comme les disciples : c’est-à-dire en réveillant le Seigneur pour qu’il musèle la mer et qu’un grand calme se produise « en nous ».

Bien sûr, cela se fera en celui qui réveille Jésus et pour les quelques-uns qui seront dans la barque avec nous.

Réveillons le Seigneur pour qu’il musèle la mer déchainée.

Quand le grand calme se fera, 2 choses se produiront en nous :

La première est qu’on passera de l’angoisse de la cacophonie à la crainte (de Dieu) voyant ce que Jésus fait.

C’est ce qui se passe pour les disciples : 4.41 Ils furent saisis d’une grande crainte

Le voyage vers le Seigneur ne sera plus un voyage de la peur mais un voyage de crainte et de foi.

La deuxième chose qui se produira en nous, c’est qu’on va pouvoir « enfin » tenir un discours non emprunt de peur sur les événements qui nous plongeront dans l’inconnu. Nous pourrons enfin témoigner du Seigneur véritablement.

Dans ce récit, on se rend compte que le voyage vers Dieu nous fait traverser des événements qui nous plongent dans cet inconnu qui fait peur, mais ce récit nous montre aussi comment traverser ces événements dans la calme et la confiance grâce à Jésus et à la foi qui se formera en nous.

Que le Seigneur nous aide dans ce voyage vers le Lui, qu’il musèle la cacophonie et augmente notre foi en Lui.

A lui seul soit la gloire.

AMEN

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