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Médiation dimanche 13 avril
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Culte présidé par Roland Laipe. Texte : Luc 19, 28-40
Oui, comme nous venons de chanter, « il n’y a vraiment personne comme Jésus ». Et c’est tellement vrai que nos textes bibliques s’en font l’écho.
Et l’Evangile de Luc, lu ce matin, nous partage son regard sur ce qu’il a compris de l’identité de Jésus.
Nous avons apporté du Lilas, pour fleurir notre salle. C’est peut-être le signe des Rameaux, signe de notre joie. Et vous l’avez peut-être remarqué : dans l’Evangile de Luc, il n’est pas question de Rameaux, de couper des plantes, des branchages, de faire une haie d’honneur…comme on peut le lire dans l’Evangile de Matthieu, par exemple !
Chaque Evangile a un message particulier à transmettre. Mais ce n’est pour dire que les autres seraient dans l’erreur, la confusion de la transmission.
Chaque Evangile a une tonalité particulière, et ce matin, je souhaite redécouvrir avec vous, ce que Luc souhaite nous transmettre.
Je crois qu’aujourd’hui, nous sommes à la même distance de compréhension ou d’incompréhension que ces disciples qui ont vécu cette montée vers Jérusalem, en descendant du jardin des Oliviers.
L’évangéliste décrit une entrée, sous une acclamation des disciples. Bien sûr, il y a la foule, mais elle ne s’était pas déplacée pour Jésus. Le peuple de croyants venait à Jérusalem pour vivre la Pâque.
Nous sommes les témoins d’un acte de foi des disciples mêlé à de l’incompréhension vis-à-vis de l’identité de Jésus. Il y a également l’ébauche d’une hostilité que va aller grandissante.
Les disciples pressentent bien que Jésus n’est pas un homme comme les autres, qu’il vit un lien particulier avec Dieu, qu’il est peut-être le Bien aimé de Dieu, avec le Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob.
Les Ecritures parlent d’un Messie, d’un envoyé de Dieu, d’un Fils de L’homme qui va venir dans les temps derniers. Il y a l’espérance de la restauration de la royauté d’Israël. Ils attendent un Roi ?
Ils attendent un Messie qui assumera deux fonctions : grand prêtre et roi
Peut-être que ces disciples espèrent assister à l’intronisation d’un nouveau roi ?
Ils attendent un roi. Mais quelles sont leurs attentes vis-à-vis de ce roi ? Quelles sont les attentes de la foule ? Quelles sont les attentes de ses opposants ?
Notre texte mêle révélation divine et menaces
L’Evangile de Luc partage ce questionnement identitaire, ces attentes et désir aider le lecteur à cheminer. Oui, Jésus est Roi, mais sa royauté ne s’exerce pas à la manière du monde.
Oui, Jésus est le Messie, mais il ne vient pas révéler la Parole de Dieu pour asseoir un pouvoir ou pour se sauver lui-même.
Et vous l’avez peut-être remarqué : Jésus parle souvent du Fils de l’homme, sans dire : je suis le fils de l’homme.
Derrière un titre, nous pouvons y mettre une étiquette, une définition, une compréhension qui sont éloignées de ce que Jésus est venu dévoiler.
Aujourd’hui, nous voyons un Jésus qui accepte les acclamations, l’expression de joie de ses disciples. Tout semble avoir été préparé avant, pour chercher un ânon. Il n’y a pas de grandes liesses populaires.
Et en même temps, des menaces s’expriment.
Finalement, qui est ce roi qui vient au nom de Dieu ?
Ce n’est vraiment- pas un roi comme les autres …
Comment va-t-il régner ?
Il est des attentes humaines d’un roi politique, qui se déclinent en légitimant, la violence, la prédation, la recherche de toute puissance.
Aujourd’hui, nous avons le roi Trump et ses disciples…..qui favorisent les dérégulations économiques, qui écartent l’esprit critique, qui cherchent à effacer certains acquis universels de la science ….pour reconstruire l’hégémonie des Etats Unis
Le roi Poutine, et d’autres rois, à sa suite, s’affranchissent des droits de l’homme et du droits des peuples à disposer d’eux-mêmes.
Et autour de nous, il y a d’autres rois, ou roitelet, qui envisagent la déportation des étrangers sous mesure d’OQTF, qui rêvent d’un royaume où il n’y aura plus aucun étranger … ou plus précisément aux confins de leur royaume, vers Saint Pierre et Miquelon !
D’autres encore rêvent de la restauration d’une justice de l’Ancien Régime , marquée par l’influence des puissants sur les faibles….
Chacun avance ses pions sur l’échiquier mondial en mettant en avant la puissance des armes et des décisions politiques qui fracturent, qui désolidarisent, qui stigmatisent, qui excluent…
De quelle royauté avons-nous besoin, aujourd’hui ?
Serons-nous prêts à élire, à acclamer des prédateurs, des dictateurs ?
Avons-nous besoin d’une royauté qui exclue, qui défait les liens entre les différentes communautés humaines, qui cherchent à imposer une toute puissance ?
Et c’est sans doute à cause de toutes ces interprétations fallacieuses et diverses, dans le monde d’hier et d’aujourd’hui, que nous pouvons être
Jésus se démarque de ces manières d’envisager la royauté qui ne laissent de la place qu’à l’arbitraire, qu’au malheur, qu’à l’injustice.
Si nous poursuivons la lecture de l’Evangile de Luc, jusqu’à la Croix, jusqu’au jour de Pâque, nous assistons au même questionnement, de la part des détracteurs de Jésus :
Si tu es Roi, sauve-toi toi-même ? Si tu es Messie, donnes-nous encore un signe ? Sauve-toi toi-même ?
Les signes de la royauté, de la Messianité ne seront pas dans la recherche de toute puissance, dans l’assouvissement d’un désir personnel de puissance, dans la recherche d’un effondrement d’une civilisation, dans la recherche de boucs émissaires, dans la désintégration des fraternités, des sororités.
Cette royauté s’exerce bien autrement. Et c’est sans doute ce qui a toujours désarçonné les croyants de tous les temps
Nous aspirons tous à un monde meilleur, à un monde moins complexe.
Les disciples sont remplis de joie et se nourrissent d’attentes du miraculeux, de l’extraordinaire, d’un règne qui éradiquerait toute souffrance, toute maladie, qui aplanirait les obstacles, qui arracherait toutes les ronces qui jalonnent nos vies ?
Peut-être nous arrivent-ils aussi d’avoir cette petite musique en tête, cette aspiration à être au bénéfice d’un miracle, d’un geste extraordinaire ?
Attendons-nous un Roi qui est un grand guérisseur, le guérisseur de tout le monde ?
2. Avec ce récit, tel que Luc nous le raconte, nous pouvons nous interroger également sur le contenu de nos paroles, de nos cris.
Allons-nous demeurer dans la louange ? Allons-nous témoigner d’une royauté à nulle autre pareille ? Allons-nous alimenter l’attente du miraculeux, de l’extraordinaire ?
Ou
Témoignerons-nous d’une présence, d’un accompagnement, d’un soutien dans tout ce que nous pouvons vivre, faire ?
Attendons-nous des solutions simplistes, dans la construction de nos relations avec notre prochain, de nos relations au sein de nos communautés ecclésiales, nationales, de nos relations intercontinentales.
Ou
Attendons-nous la présence de Dieu dans la construction de nos fraternités, de nos sororités ? Attendons-nous davantage de bienveillance, de sollicitude, d’amour, de Paix ?
Oui, du temps de Jésus, c’était déjà complexe de témoigner de cette royauté, d’en vivre les signes, d’en exposer les prémices.
Bien des personnes s’élevaient déjà contre les paroles et les gestes de Jésus.
De tout temps, il est des personnes qui viennent dire : « Maitre, reprends tes disciples ».
Ce n’est pas politiquement et religieusement correcte de manifester de la compassion, de la solidarité avec les plus vulnérables, les plus fragiles d’entre nous.
3. A l’écoute de ce récit, je vous propose d’ être parmi la foule
Imaginez voir et entendre les disciples.., les joies proclamées ; Voir et entendre les détracteurs ….ces détracteurs qui demandent à Jésus de se taire !
Jésus parle à contre-courant de certaines aspirations humaines, lorsqu’il dénonce les injustices, lorsqu’il témoigne de la dignité de chaque vivant, lorsqu’il vient appeler quiconque à prendre soin de chaque vivant. Il vient dévoiler le plan de Dieu, qui entre en confrontation avec l’élan naturel humain. Il persévère malgré l’opposition grandissante.
Il témoigne d’une puissance de l’amour qui prend chaque jour le risque d’être bâillonné, d’être tué.
Aujourd’hui encore, il est demandé à des chrétiens de se taire, parce qu’ils seraient des hurluberlus, des idéalistes, des personnes déconnectées des réalités mondaines, économiques, sociales …
Et pourtant Jésus n’a eu de cesse que de parler d’amour, de paix. Dans un monde complexe, cloisonnés par des règles religieuses, politiques, il s’est approché de chacune, de chacun, pour témoigner d’une bienveillance de Dieu pour toutes ses créatures, pour toute sa création.
Et c’est ce que l’Evangile de Luc nous transmet en filigrane.
Si nous n’avons plus de voix, si nous ne pouvons plus rien dire, au sein de notre monde, à nos enfants, à nos petits-enfants….
S’ils sont remplis de désespérance, remplis d’inquiétudes, vis-à-vis de l’avenir, souvenons-nous de cet élan inlassable de Dieu qui se dévoile en Jésus-Christ, de Jésus qui persévère à conjuguer l’amour, la paix, dans un monde qui rejette l’exercice de cette royauté d’amour ! L’amour et la paix demeurent à l’horizon de notre présent et de notre avenir.
Les pierres, nous savons bien qu’elles ne peuvent pas crier. Et Jésus atteste que les pierres crieront si les humains se taisent. Le Salut de Dieu prend le risque de la contestation, de l’effacement mais aucune réalité terrestre n’arrivera à le contenir totalement.
C’est une image pour nous dire, qu’à Dieu, tout est possible.
Même si nous, nous ne trouvons plus les mots,
même si nous désespérons, parfois ou souvent,
même si nous ne savons plus quel chemin prendre, quelle parole accueillir, quelle parole transmettre,
même si nous sommes pétrifiés,
n’ayons pas peur de devenir à l’image des pierres, des réceptacles de cette présence de Dieu, et retrouvons notre vocation à transmettre, à traduire, à exposer des paroles et des gestes qui dévoilent la royauté de Dieu, tel que Jésus en témoigne !
Que ce récit du jour nourrisse notre persévérance !
Qu’il soutienne notre foi et nous aide à envisager qu’un autre avenir est toujours possible, un avenir sous le signe de l’amour et de la paix, en nous et autour de nous.
Amen