« Je vous ai appelés amis, parce que je vous ai fait connaître tout ce que j’ai entendu de mon Père. Ce n’est pas vous qui m’avez choisi, c’est moi qui vous ai choisis et institués pour que, vous, vous alliez, que vous portiez du fruit et que votre fruit demeure ; afin que le Père vous donne tout ce que vous lui demanderez en mon nom. » (Jean 15,15 b-16)
Le onzième synode de la région Centre-Alpes-Rhône, réuni les 10, 11 et 12 novembre 2023 à Vogüé, sollicité pour donner ses avis aux propositions élaborées par l’équipe nationale en charge de la réflexion « Mission de l’Église et ministères », a d’abord souhaité s’approprier les étapes précédentes de la démarche, en particulier les « Grandes orientations » déclinant la « Charte pour une Église de témoins », textes adoptés par le synode national de Mazamet (2022).
Afin d’éclairer ses avis, le synode régional s’est appuyé sur lesdites orientations pour exprimer sa vision d’une Église renouvelée. Il a ensuite identifié les besoins correspondants et formulé des propositions pour adapter ses ressources et ses ministères à sa mission.
L’Église que nous souhaitons s’enracine dans le Christ, l’écoute de la Parole, la prière. Témoin de la Bonne Nouvelle, animée par l’espérance, fraternelle, elle fait de l’accueil et de l’écoute de chacune et chacun dans sa diversité une priorité. Elle développe les liens communautaires. Elle valorise l’engagement de ses membres dans le monde, prend soin d’eux, les forme et leur offre des moyens de ressourcement. Courageuse et ouverte, elle ose se tenir hors de ses murs et traverser des frontières. Comprenant ses contemporains, elle développe des partenariats avec d’autres communautés, œuvres, mouvements, associations, en vue d’offrir des espaces de rencontre et de partage. Dans le prolongement de la Réformation, l’Église sait évaluer ses pratiques, les adapter, s’alléger, innover, créer. Son fonctionnement privilégie la collégialité ; il témoigne d’une confiance en paroles et en actes vécue entre ses différentes composantes. Elle foisonne d’initiatives et reconnaît une diversité de ministères, rendant grâce à Dieu pour les talents qu’il accorde à ses enfants.
Le synode exprime sa reconnaissance pour les fruits que porte déjà notre Église et les graines qu’elle continue de semer.
En chemin vers cette Église souhaitée, le synode a fait émerger 7 séries de propositions :
1. S’enraciner dans la prière et la vie spirituelle
Le synode souhaite que chaque paroissienne ou paroissien et chaque Église locale puisse régulièrement se réenraciner dans le Christ et nourrir sa spiritualité. Il souhaite que soient développés des lieux et des moments de recueillement et de ressourcement communautaires ou individuels (par exemple des retraites), redonnant à toutes et tous vie et souffle dans leurs engagements.
Plusieurs propositions sont faites :
À la Commission des ministères :
– réfléchir à la création d’un ministère d’accompagnement spirituel, porté par des pasteurs ou non, à la formation nécessaire, à sa reconnaissance et sa valorisation.
Au Conseil régional et à la Coordination régionale :
– veiller à la formation, au sein de chaque consistoire, à la vie spirituelle et à la prière communautaire intégrant la diversité des sensibilités théologiques ;
– proposer régulièrement des formations au témoignage à partir des ressources diverses et variées déjà disponibles (ministres spécialisés, parcours FETE, etc.).
À chaque consistoire :
– veiller à organiser chaque année une retraite priante pour les conseillers presbytéraux ;
– proposer des temps de retraite animés par des intervenants extérieurs en favorisant et en développant les liens avec les communautés existantes (Diaconesses, Fraternité des Veilleurs, Communion de Caulmont, Taizé…) ;
– à proposer régulièrement des formations aux prédicatrices et prédicateurs — y compris formation à l’oralité.
Chaque Église locale doit être attentive à :
– renouveler la forme du culte à travers la dimension musicale et le renouvellement du répertoire chanté, l’adaptation du langage par une liturgie contemporaine, la mise à disposition de locaux et d’instruments de musique favorisant l’appel à de nouveaux musiciens.
2. Mieux accueillir
Le synode invite à porter de l’attention à l’accueil de toutes et tous et à accorder plus de place aux jeunes générations. Il nous invite à accepter que celles et ceux que nous accueillons ne s’engagent pas forcément dans l’Église et à ouvrir nos portes pour reconnaître celles et ceux qui sont sur le seuil. Accueillir dans des conditions satisfaisantes signifie concrètement disposer de locaux accueillants, confortables, accessibles, visibles et adaptés (par exemple pour l’accueil des enfants).
Pour mieux accueillir dans nos Églises, plusieurs propositions sont faites :
À la Coordination nationale :
– recenser ou produire des ressources autour des questions d’accueil dans l’Église ainsi que des supports de formation ;
– organiser des formations à l’interculturel, à l’interculturalité dans l’Église.
À la Coordination régionale ou au Conseil régional :
– mettre en place un programme de formation à l’accueil (cette action a été explicitement demandée par une forte majorité des travaux de groupe du synode) ;
– organiser régulièrement un synode régional des jeunes.
À chaque consistoire :
– veiller à mettre en place régulièrement un parcours d’accueil des nouveaux à partir de ressources existantes (parcours Alpha, Voyage au pays de la foi, etc.) ;
– réfléchir à la mise en place de nouveaux lieux d’accueil hors des temples (cf. Chez Téo).
À chaque conseil presbytéral :
– recevoir régulièrement des jeunes lors de ses réunions ou en organisant des conseils presbytéraux de jeunes.
3. Faire du lien, faire unité
Le synode redit son souhait de former une Église qui fait corps, qui prend soin de ses membres : elle propose des lieux de rencontre et de partage, sait discerner et reconnaître les compétences et talents pour donner une place à chacune et à chacun, sait dire « non » à des comportements inappropriés et gérer les conflits, et sait faire confiance, dire « oui » et faire bon accueil aux initiatives et propositions des personnes. Elle apprend à connaître les besoins d’entraide et sait mobiliser des moyens diaconaux pour y répondre.
Plusieurs propositions sont faites :
À la Coordination nationale :
– proposer des formations au ministère d’animatrice ou animateur communautaire chargé de l’unité, de l’animation et de la coordination locale, permettant à la paroisse et à ses membres : à l’interne, de prendre soin des un·e·s et des autres et de faire du lien, et à l’externe, de créer de la rencontre — à l’image d’un mouvement de respiration ; ce ministère peut s’exercer en l’absence d’un pasteur ou aux côtés de celui-ci ;
– proposer régulièrement, pour une diversité de ministres et d’acteurs de notre Église, des formations à l’animation ainsi qu’à l’écoute et à l’accompagnement.
Aux niveaux régional et consistorial, voire des ensembles :
– poursuivre et renforcer toutes les initiatives permettant la rencontre et la création de liens fraternels au-delà des activités paroissiales.
Aux Églises locales, de favoriser les occasions de rencontres et de partage, par exemple :
– en interne, notamment par le biais de groupes de maison ;
– en externe, dans des visites d’Églises locales à d’autres Églises locales.
4. Développer l’ouverture et les partenariats
Le synode encourage les Églises locales à ouvrir avec discernement leurs temples pour des activités non spirituelles, à soutenir les associations du tissu local, notamment en les intégrant à des temps cultuels, en soutenant ses paroissiennes et paroissiens engagés dans la cité. Outre les aumôneries, d’autres lieux tels que parvis, cafés, places de marché, pieds des immeubles, salles municipales… peuvent devenir des lieux de présence et de témoignage au plus près de nos contemporains. Osons développer les initiatives œcuméniques et interconvictionnelles, notamment pour répondre aux défis de notre monde (climat, migration, égalité de genres…) ! Les Églises locales pourraient devenir des lieux de partage d’expériences, notamment internationales.
5. Redonner du sens à notre vie d’Église ou comment être Église autrement
Le synode souligne l’importance pour chaque Église de prendre le temps de réfléchir à son projet de vie : comment être Église autrement ? Il s’agit pour nos communautés locales de redonner du sens au service, de grandir ensemble et de disposer de compétences pour évaluer les besoins, accompagner les projets et les changements nécessaires.
Plusieurs propositions sont faites :
À la Coordination nationale :
– proposer une formation à la conduite des projets d’Église, à destination des pasteurs, ministres et toute autre personne engagée dans la vie de son Église locale.
Au Conseil régional :
– prendre le temps dans ses visites aux Églises locales d’analyser la réalité de leur situation et de proposer l’accompagnement adéquat ;
– réfléchir à la mise en place d’un ministère régional chargé ;
o d’accompagner les Églises locales au changement en les éveillant à leurs besoins et en clarifiant avec elles leurs projets,
o de réfléchir aux bons leviers de leur accompagnement ;
– mettre en place régulièrement un forum régional des « engagés de l’Église » et une bourse de compétences pour favoriser le partage d’expériences et d’idées.
À chaque consistoire, ensemble et paroisse :
– identifier des missions qui pourraient être confiées à des jeunes (service civique ou stagiaire) en lien avec des partenaires identifiés (VISA-AD APSAJ …) ;
– favoriser la confiance mutuelle pour oser partager besoins et ressources.
6. Alléger la gouvernance de nos paroisses
Le synode souhaite développer une gouvernance plus collégiale, avec des conseillères et conseillers presbytéraux plus représentatifs de la diversité des membres des Églises locales. Il souhaite pouvoir décharger les conseils presbytéraux des tâches de gestion et mutualiser leurs forces sur les questions administratives, financières et de communication. Il souhaite que les relais du niveau régional favorisent davantage la transmission d’informations entre le national et le local. Il souhaite que soit améliorée la mise en relation entre les expériences, informations utiles et pertinentes, d’un côté, et celles et ceux qui en ont besoin, de l’autre.
Plusieurs propositions sont faites :
Au Conseil régional :
– faciliter la mutualisation ou le transfert des tâches de gestion comptable ou immobilière ;
– offrir des lieux d’accompagnement des présidentes et présidents de conseil presbytéral (retraite spirituelle, temps de relecture, groupe de pairs, accompagnement ponctuel…).
7. Tracer les contours de nouveaux ministères
Concernant la mise en place de nouveaux ministères, le synode régional préconise que le Conseil national et la Commission des ministères réfléchissent à :
– offrir un tronc commun de formation à l’ensemble de ces ministres, favorisant le partage d’une culture et d’une vision d’Église communes, en lien avec les communautés, œuvres et mouvements ;
– permettre la mise en œuvre de formations à la carte, tenant compte de la réalité des dons de ces ministres et de leurs formations préalables ;
– favoriser des démarches de formation privilégiant la formation continue et pratique en offrant des lieux et des temps de stage adaptés ;
– la manière de leur offrir reconnaissance et sécurité par des conditions de travail stables et pérennes.
Parmi les nouveaux ministères envisagés ont été cités :
Au niveau régional :
– des ministères artistiques (théâtre, musique, arts plastiques) pour soutenir le témoignage des Églises locales.
Le synode encourage les niveaux consistorial et paroissial à valoriser les ministères autres que pastoraux (animatrices et animateurs de groupes bibliques, prédicatrices et prédicateurs, catéchètes, animatrices et animateurs d’école biblique…) qui édifient l’Église.