Médiation dimanche 24 novembre

Culte présidé par la pasteure Claudia Schulz. Texte : 2 Corinthiens 5, 11-15 (16 -20)

Sœurs et frères en Christ, mes bien-aimés en Christ,
Nous avons regardé la question de la relation à travers les 4 aspects essentiels : avec Dieu, avec soi-même, avec l’autre et avec la nature ces deux derniers jours. Nous avons pris conscience que toutes ces relations sont marquées par la fragilité, la vulnérabilité. La conscience de la fragilité, de la vulnérabilité de nos relations peut nous aider à les envisager avec moins de dureté, moins d’intransigeance avec plus de bienveillance.
Nos relations fragiles à cause des circonstances extérieures
Nos relations sont rendues fragiles par des conditions matérielles, sur un plan technique : Quand il pleut en Afrique, la connexion internet est instable. Elle s’interrompt fréquemment. Nos communications, nos relations en sont fragilisées. La nature pose des limites au désir de toute puissance et toute maitrise de l’homme.

Elles peuvent aussi être mise en danger par des règles, des lois qui favorisent une catégorie de personnes et marginalisent une autre. Vous avez peut-être entendu parler ces derniers jours de la jeune femme iranienne qui s’est dévêtue devant l’université à Téhéran en public pour protester contre les règles strictes du code vestimentaire : Ahou Daryaei.

Symbole d’une vulnérabilité et en même temps d’une grande force. Rappelons qu’elle a été internée dans un asyle psychiatrique car considérée comme fragile, folle sur le plan mental…

Dans l’évangile de Luc nous avons entendu parler d’une femme qui entre humblement en relation avec le Christ par des gestes d’amour, de tendresse. Les hommes présents savent qu’elle ne respecte pas les règles de la société, ni Jésus qui se laisse toucher par elle. Cette rencontre témoigne d’un élan d’affection, d’une rencontre spontanée sans arrière-pensée. Le Christ entre en résonance avec elle, il se laisse toucher par cette femme. Ses gestes lui parlent, puis il lui parle. Elle en sortira transformée, car elle est devenue sujet aux yeux du Christ et non plus objet de désir des hommes autour de lui. Réconcilié avec Dieu et avec elle-même elle peut désormais poursuivre sa vie.

La pasteure Riana de Madagascar (FJKM) écrit : « Il y a quand même des femmes qui n’attendent rien d’un homme, pas de matériel, pas d’argent. Elles veulent juste de l’amour, de la confiance, un grand soutien et de l’affection. Dans un monde où tout semble devenir échange et intérêt, certaines âmes ne désirent que la simplicité d’un amour sincère. Elles n’ont pas besoin de cadeaux somptueux ou de promesses en l’air, elles aspirent seulement à la sécurité d’une étreinte, à l’honnêteté d’un regard, à la tendresse d’un mot. Ce sont des cœurs qui battent pour l’essentiel, pour la beauté d’une connexion profonde et authentique. » Hartmut Rosa appellerait cela de la résonance. Nos relations avec le monde Dans ce monde en crise, avec des relations abîmées, instrumentalisées, marchandisées, quel rôle avons-nous à incarner, nous, les disciples du Christ? Comment transformer le monde ?

Comment le réconcilier avec Dieu ? La mission est là. Non, pas pour montrer notre force, notre éloquence, non pas instrumentaliser Dieu, mais parce que l’amour du Christ nous étreint, nous presse ! Lors de la dernière AG de la CETA en novembre 2023 à Abuja/Nigéria, Le secrétaire général de la CETA, Fidon Mwombeki a expliqué que les grands défis de l’Afrique sont au nombre de trois : le tribalisme, la pauvreté et le changement climatique. Ils sont interconnectés et source des migrations illégales vers le Nord, notamment l’Europe. Tout au long de l’AG un sentiment d’urgence se faisait sentir, induit par le mot d’ordre biblique : L’amour du Christ nous presse… à proclamer l’Evangile avec passion et compassion… à sauvegarder la dignité humaine … à œuvrer pour la justice et la paix, … à être les intendants de la création de Dieu, ….à exercer un leadership éthique.

Quand je regarde les défis qui se posent en Europe : la montée de la xénophobie, la baisse du pouvoir d’achat et le changement climatique, je constate que les sujets sont similaires, même si les mots utilisés et les contextes sont différents.

De même Paul dans sa 2e épitre aux Corinthiens argumente avec engagement pour que les relations entre les membres de la communauté changent. Il désire tant que l’église de Corinthe témoigne vers l’extérieur comment le Christ les a transformés en nouvelles créatures. L’appel vibrant à la réconciliation

L’amour du Chris nous étreint, nous presse dit-il, de ne plus vivre pour nous-même, mais il nous pousse à agir en connaissance de cause. Les théologiens récents s’accordent pour dire que nous avons ici la clé de compréhension de la théologie de Paul : l’appel à la réconciliation.

Puisque la nouvelle ère commence, les croyants peuvent devenir des personnes nouvelles. Puisque la nouvelle ère commence de nouvelles relations sont possibles. L’offre de réconciliation de Dieu s’exprime par son peuple. (C’est ce rêve, cette utopie que la Cevaa tente de vivre et de rendre visible depuis plus de 50 ans.)

Préambule des statuts
« Des églises protestantes de divers continents, réunis le 30 octobre 1971 à Paris, reconnaissantes envers Dieu qui leur a révélé en Jésus Christ son amour pour le mode entier, … convaincus que… le Seigneur les appelle à s’engager dans des relations nouvelles, ont décidé de constituer la Communauté Evangélique d’Action Apostolique (CEVAA). ») Les disciples sont de créatures nouvelles, car le Christ est mort pour eux et les a fait entrer dans un nouvel ordre spirituel. C’est à la fois une réalité et en même temps un défi, car nous demeurons dans la chair, nous sommes toujours aux prises avec les réalités du péché. Nous trainons nos vieilles façons de nous considérer, de nous méfier des autres, de nous jalouser…

Chez les Corinthiens ce processus de nouvelles relations s’est grippé, car des personnes mettaient en doute l’autorité de l’apôtre et la véracité de son message. De plus certains l’accusaient de voler les collectes des Corinthiens pour les chrétiens de Jérusalem. Dans nos communautés chrétiennes nous vivons aussi des moments où il nous arrive à nous demander : « Est-ce que l’autre est vraiment un chrétien ? Il a des comportements qui me blessent, me dénigrent, m’excluent. Il a commis des actes inacceptables. Même à la Cevaa il nous arrive de voir que les relations qui avaient été rêvées nouvelles et transformées par le Christ, deviennent conflictuelles, méprisantes, remplies de ressentiments et chargées de préjugés.

« A l’échelle de l’église mondiale, l’Eglise est encore aux prises avec le fanatisme de la supériorité raciale et culturelle, alors que la croix du Christ met tous les êtres humains sur le même plan. En d’autres termes, le pouvoir égalisateur du Christ ne sera pas manifeste parmi les ses disciples tant que la nouvelle création ne sera pas réalisée dans les rapports humains. » note le bibliste Kenneth Mtata du Zimbabwe, actuellement directeur des programmes au COE à Genève. Cette double réalité entre une nouvelle relation à soi et au monde grâce au Christ, et les déterminismes, l’esclavage du péché montrent que la nouvelle création n’est pas statique, car la vie n’est pas statique, mais dynamique, toujours en évolution. Toujours et à nouveau, Paul invite ses communautés à la réconciliation. L’apôtre se soucie de cette communauté bouillonnante qu’est l’église de Corinthe. Avec ses paroissiens venus de différentes origines, culturelles, religieuses, linguistiques, issus de différentes classes sociales. Il sent que sans pardon et sans réconciliation cette communauté imploserait. Elle ne pourrait pas non plus être témoin du Christ mort et ressuscité autour d’elle dans cette ville portuaire. Pour l’apôtre Paul la réconciliation entre les êtres humains et Dieu est terminé ! Lui seul a pris l’initiative en s’engageant personnellement par l’envoi de son fils Jésus Christ. Par lui Dieu renouvelle son alliance avec les humains. Et c’est si fondamental pour Paul qu’il le compare d’un retour de la mort à la vie (Romains). Voilà pourquoi Paul insiste tant auprès des Corinthiens : « Au nom du Christ, nous vous en
supplions, laissez-vous réconcilier avec Dieu. » (v. 20) L’orientation missionnaire de Paul La compréhension de l’ampleur et de la profondeur de l’amour Dieu -Agapé – qui conduit, guide, oblige et qui nous motive et nous inspire pour nous relier au Dieu trinitaire, à l’humanité et à la création tout entière. Nous sommes appelés à ne plus vivre pour nous-mêmes (v.15), mais à vivre pour le Christ. L’amour de Dieu n’est pas passif, mais impérieux et missionnaire par nature. C’est un amour qui pousse ceux qui le reçoivent à le rendre aux autres. C’est une énergie transformatrice qui nous pousse à agir. Comme le Bon Samaritain.

L’amour du Christ nous presse… à proclamer l’Evangile avec passion et compassion, c’est-à-dire la mission et l’évangélisation. L’amour du Christ nous pousse à « aller et à faire de toutes les nations les disciples » (Matth 28, 18 – 19 ) en témoignant de l’amour de Dieu à ceux que nous rencontrons. Le monde a tant désespérément besoin d’un amour inconditionnel et réconciliateur. Ou pour le dire avec des mots de MLK « We stand together or we sink together. » Nous tenons ensemble ou nous coulons ensemble.

Prenons soin de nos relations avec Dieu, avec nous-même, avec les autres et avec la nature. Aimons ceux et celles qui nous sont confiés. Elargissons notre compréhension de l’Ubuntu à l’échelle planétaire comme le formule le pasteur Masilo Martin Phate de l’église évangélique du Lesotho.

Que nous soyons humbles dans nos engagements
Que nous soyons réservés dans nos jugements
Que nous soyons motivés par notre désir de plaire à Dieu
Que nous soyons conscients qu’un jour nous serons soumis au jugement de Dieu et que nous rendrons compte concernant nos responsabilités.

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