Le beau texte d’Esaïe 52 nous invite à sortir de la morosité, de l’abattement, dans lesquels l’avalanche quotidienne de mauvaises nouvelles nous fait sombrer. En 2023, nos espoirs de paix, de justice entre les riches et les pauvres, se sont encore un peu plus éloignés.
Et ne parlons pas de la sauvegarde de la création : plus que jamais soumise à la vanité, comme l’écrit Paul aux Romains (Rm 8, 20), à ce qui est « vide de sens », du fait des impasses dans lesquelles se fourvoie l’humanité, elle ne peut qu’ « attendre avec impatience la révélation des fils et des filles de Dieu » !
En donnant la parole et une âme aux ruines de JERUSALEM, et à la création elle-même, / que nous regardons comme des choses inanimées, / la pensée biblique nous surprend à la manière des poètes surréalistes. Elle projette sur le monde extérieur ce qui se passe à l’intérieur de nous, ce que produit sur nous l’environnement dans lequel nous sommes et les évènements qui arrivent sur nous.
Paul insiste, toujours dans l’épître aux Romains (8, 22) :
« Nous le savons, jusqu’à ce jour, la création tout entière soupire et souffre les douleurs de l’enfantement. Bien plus, nous aussi, qui avons les prémices de l’Esprit, nous aussi nous soupirons en nous-mêmes, en attendant l’adoption filiale, la délivrance pour notre corps » .
Je pense que Paul avait déjà tout compris de l’Anthropocène : littéralement « l’ère de l’humain », l’ère où l’être humain devient la mesure de toutes choses, pour le meilleur ou pour le pire !
Mais je reviens à Esaïe: c’est d’abord la vue d’un messager, au loin, courant par-dessus les montagnes, qui fait sortir de leur torpeur les guetteurs de JERUSALEM en ruines. Ils ne savent pas au départ de quel genre de nouvelle va être porteur ce messager, et doivent se préparer au meilleur comme au pire. Mais le messager approche, et ils captent maintenant le message : « Ton Dieu est roi !»
Alors la voix des guetteurs s’élève à son tour pour avertir les habitants de la ville. Depuis le siège de la ville par les Babyloniens, la destruction du Temple, et la déportation des élites à Babylone (en 596 av. notre ère), la population était comme dans un deuil dont on ne peut se relever. Elle avait perdu son espérance, sa joie de vivre, et pensait même avoir perdu son Dieu !
Mais cette fois, le message est celui qu’on n’attendait plus… un message de paix, de salut ! Que du bon !… « Ton Dieu règne. Il revient à Sion avec le cortège des exilés, il ouvre et ferme la marche derrière son peuple, comme jadis au désert… Le SEIGNEUR console son peuple, il rachète JERUSALEM… Il a dévoilé son bras de sainteté aux yeux de toutes les nations… Les confins de la terre verront le salut de notre Dieu ! »
Bref, une bonne nouvelle, une vraie… puisque elle réactive la joie, l’enthousiasme des guetteurs et des habitants restés enfouis si longtemps sous les gravats du temple et des murs de la ville, anéantis par Nabuchodonosor.